À Fontenoy, dans le Hainaut belge, près de Tournai, l’armée française de Louis XV, sous le commandement du maréchal Maurice de Saxe, bat une coalition formée des Provinces-Unies, de la Grande-Bretagne, du Hanovre et de l’Autriche, commandée par William Augustus, duc de Cumberland (1721-1765).
La bataille, décisive quant à l’issue de la guerre de la Succession d’Autriche, se déroule en présence – fait rarissime – du roi Louis XV et de son fils, le Dauphin (15 ans), futur père de Louis XVI.
Cinq ans plus tôt, la mort de l’empereur Charles VI et la montée de sa fille Marie-Thérèse sur le trône autrichien ont jeté les grandes puissances européennes dans la guerre, avec des alliances à direction variable. Allié de l’Électeur Charles-Albert de Bavière, le roi Louis XV lance ses troupes sur les Pays-Bas autrichiens (la Belgique actuelle).
Maurice de Saxe, qui commande l’armée, entreprend le siège de Tournai.
Mais les armées alliées, sous le commandement duc de Cumberland, troisième fils du roi d’Angleterre George III, tentent de le prendre en tenaille. Le maréchal n’a d’autre solution que de livrer bataille. Le roi Louis XV et le Dauphin, devant l’importance de l’enjeu, décident de le rejoindre le 8 mai 1745 pour stimuler l’ardeur des combattants.
Lors de la bataille de Fontenoy, le maréchal Maurice de Saxe n’aligne en un premier temps qu’une force de 55 bataillons d’infanterie, de 101 escadrons de cavalerie, du corps des arquebusiers de Grassin, et de 60 pièces d’artillerie, soit quelque 48 000 hommes. Au fil du combat, ses effectifs sont toutefois renforcés par l’arrivée de nouvelles unités qui porteront en définitive les effectifs français au nombre de 62 bataillons et de 123 escadrons, soit quelque 53 000 hommes. Une force de 25 bataillons d’infanterie, de 2 bataillons et demi d’artillerie et de 17 escadrons de cavalerie, aux ordres du lieutenant-général marquis de Brézé, resta postée face à la ville de Tournai.
Les forces du duc William de Cumberland regroupent quant à elles quelque 47.500 hommes, répartis en 46 bataillons, 90 escadrons, deux compagnies franches autrichiennes et 93 pièces d’artillerie. Les troupes alliées se répartissent en 22 000 Néerlandais, 16 900 Britanniques et 7 168 Hanovriens. Ne regroupant que 1350 hommes, le contingent autrichien, aux ordres du Feldmarshall Königsegg, est formé de quatre escadrons de dragons ( Ferdinand de Ligne et Limbourg-Styrum), de quatre escadrons de hussards (Kàrolyi et Beleznay) et de deux compagnies franches (Bouvier et Pertuiseaux).
Dès le 9 mai, le maréchal de Saxe a habilement choisi le terrain et disposé ses troupes sur une ligne brisée, face à une petite plaine au bord de l’Escaut. Le duc de Cumberland dispose ses hommes de façon classique en ligne mince face aux Français.
La bataille commence dès la dissipation des brumes matinales par une canonnade de deux heures. Ensuite monte à l’attaque l’infanterie alliée.
Suite à l’échec de plusieurs attaques ciblées, Cumberland ordonne une attaque en masse de 15 à 16.000 hommes, sous la forme de trois grosses colonnes qui mêlent l’infanterie, la cavalerie et l’artilleries, en remontant un sol légèrement pentu, le célèbre « ravin » de Fontenoy. L’ensemble se resserre en arrivant au contact des Français, vers midi.
Cette phase du combat aurait donné lieu à une anecdote légendaire, popularisée par Voltaire dans un ouvrage historique, paru en 1756. Invité à ouvrir le feu en premier par Sir Charles Hay, officier du 1er bataillon des Gardes anglaises, le comte Joseph-Charles-Alexandre d’Anterroches (1710-1785), officier français des Gardes françaises, lui aurait rétorqué : » Monsieur, nous n’en ferons rien ! Tirez vous-mêmes ! « . Cette anecdote, ne reposant que sur la seule version de Voltaire, est historiquement invérifiable. Il était cependant d’usage lors des batailles de se proférer des moqueries, voire des insultes, pour forcer l’adversaire à ouvrir un feu disparate et se retrouver en état de faiblesse. Quoi qu’il en soit, la tradition populaire ne devait retenir du légendaire dialogue, transcrit par Voltaire, qu’une citation déformées : « Messieurs les Anglais, tirez les premiers ! » et faire de Fontenoy l’exemple type de la guerre en dentelles.
Les combattants se jettent dans une mêlée furieuse et sanglante. Les Français semblent fléchir et plusieurs officiers, autour du roi et du maréchal, évoquent une possible retraite.
Mais le maréchal de Saxe fait alors la démonstration de son talent de stratège.
Ayant mesuré la fragilité de la grosse colonne ennemie, il la stoppe par l’utilisation à bout portant de quatre canons puis lance plusieurs attaques coordonnées sur ses flancs. Parmi les assaillants s’illustrent la maison du roi emmenée par le duc de Richelieu et l’infanterie irlandaise de Löwendal.
En un quart d’heure, la colonne, assaillie de tous côtés, ploie sous un déluge de fer et de feu. C’est en définitive aux Français que revient la victoire, l’une des dernières en date de l’Ancien Régime.
Sur la base d’une étude récente et détaillée des pertes, effectuée par l’historien belge Alain Tripnaux sur l’ensemble des archives européennes, le total des pertes des deux armées fut de quelque 15 000 tués et blessés, dont 2 300 tués français et 2 500 tués alliés. Ses recherches lui ont permis d’établir une liste nominative de 603 officiers français tués-blessés et de 402 officiers alliés tués-blessés. Au terme du combat, les Français s’emparèrent de 36 pièces de l’artillerie alliée et de 150 à 180 caissons.
Le soir de la bataille, comme le Dauphin manifeste une joie débordante à l’évocation des combats, son père l’admoneste avec une sagesse inaccoutumée : « Voyez tout le sang que coûte un triomphe. Le sang de nos ennemis est toujours le sang des hommes. La vraie gloire, c’est de l’épargner ».
Sitôt après le Te Deum célébré à Paris le 20 mai suivant, le maréchal de Saxe reçoit en récompense de ses exploits à Fontenoy le domaine de Chambord et le droit de pénétrer à Versailles en carrosse. Lui-même ne s’en soucie guère et poursuit ses opérations.
Il conquiert toute la Flandre, obtient la reddition de Bruxelles le 21 février 1746, un exploit sans précédent dans l’Histoire de France qui vaut au héros la dignité de maréchal général, que n’avaient eu avant lui que Turenne et Villars.
Au terme de trois grandes batailles (Fontenoy, Raucoux et Lawfeld) et de 24 sièges de places dans les Pays-Bas autrichiens et le sud des Provinces-Unies, une paix fut signée le 18 octobre 1748, à Aix-la-Chapelle. Voulant traiter « en roi et non en marchand », Louis XV rétrocéda toutefois toutes ses conquêtes autrichiennes sans contrepartie, à l’inverse du roi Frédéric II de Prusse qui conserva la Silésie, conquise sur l’Autriche en décembre 1740. Jugeant cette paix désastreuse, l’opinion publique en France critiqua amèrement le choix du monarque français et en conclut que les soldats français n’étaient finalement tombés sur les champs de bataille que pour le seul profit du roi Frédéric II. « Se battre pour le roi de Prusse » et « bête comme la paix » devinrent alors en France des maximes populaires.
https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_Fontenoy
https://www.herodote.net/11_mai_1745-evenement-17450511.php
https://www.france-pittoresque.com/spip.php?article7761
https://www.britishbattles.com/king-georges-war-austrian-succession/the-battle-of-fontenoy-1745/
https://www.persee.fr/doc/hes_0752-5702_1985_num_4_4_1406
https://www.canalacademie.com/ida8108-Les-Academiciens-racontent-l-histoire-Louis-XV-1-4.html